Harare, 6 mai 2017 (AFP)
Ils sont jeunes, branchés et avides de changement. Toute la semaine, des milliers d’entre eux ont fait la fête à grand renfort de musique et d’alcool sur la plus improbable des scènes artistiques du moment: la capitale du Zimbabwe de Robert Mugabe.
Fondé en 1999, le Festival international des arts de Harare (HIFA) n’a pas eu lieu l’an dernier, victime de l’effondrement économique du pays dirigé d’une main de fer depuis 1980 par le plus âgé des chefs d’Etat de la planète, 93 ans.
Ses habitués croyaient l’événement perdu pour toujours. Malgré le retrait de nombre de ses parrains, les organisateurs sont parvenus à le ressusciter pour une nouvelle édition, comme un gant jeté à la figure du président.
« L’argent est le problème numéro 1 de tous », estime Chidochemoyo Nemhara, un festivalier de 29 ans, « mais nous savons que le HIFA est l’endroit où nous pouvons oublier tout le reste ».
Plus d’une centaines d’artistes, musiciens, chanteurs ou acteurs, locaux ou venus de l’étranger, se sont produits cette année sur une dizaine de sites répartis dans toute la ville.
Tête d’affiche du programme, le musicien et chanteur malien Habib Koite clôturera les festivités dimanche soir.
Son directeur Tafadzwa Simba s’étonne encore du tour de force qui lui a permis d’organiser le festival malgré le retrait des entreprises, fondations et ambassades étrangères qui jugeaient sa tenue « impossible » en raison de l’état financier du pays.
« Techniquement, le pays est fauché », s’amuse M. Simba, « et pourtant nous sommes là ! »
– ‘Une vie ouverte et libre’ –
Là et volontiers provocateurs. Malgré le contrôle orwellien exercé par la police du régime, le festival affiche fièrement un mot d’ordre, « mettre en scène une intervention », très en phase avec la fronde anti-Mugabe qui a agité le pays l’an dernier.
« Tout le monde sait ce que ça veut dire », confirme Chiedza Mahere, un graphiste et blogueur de 27 ans.
« Nous sommes dirigés par un gouvernement qui veut tout prendre », poursuit-il, « mais il nous faut vivre notre vie malgré tout, une vie ouverte et libre où nous pouvons être ce que nous voulons, c’est tout le sens du HIFA ».
L’esprit est resté, donc, mais l’organisation a relevé cette année du cauchemar. Et particulièrement la mise en vente de tickets, dans un pays menacé de pénurie d’argent liquide.
Après l’hyperinflation dévastatrice du début des années 2000, le dollar américain est devenu la seule monnaie du pays. Mais, en raison de la crise, il s’est fait de plus en plus rare. Les autorités ont donc émis il y a six mois des « billets d’obligation » qui, même gagés sur le billet vert, rencontrent peu de succès.
Tout près des guichets du festival, les queues s’étirent devant les banques, grossies d’usagers bien résolus à empocher leur retrait quotidien maximal de 50 dollars.
« Le gouvernement nous demande d’utiliser ses billets d’obligations mais les magasins les refusent », rouspète Gamuchirai Gatawa, 20 ans, ticket d’entrée au festival en main, « alors je dois souvent faire la queue (à la banque) de 06H00 à 14H00 ».
– ‘Aventure’ –
Bien sûr, ces difficultés logistiques et le prix des billets ont pesé sur l’affluence, qui restera en-deça des 49.000 entrées d’il y a deux ans, admettent les organisateurs. Fixé à 20 dollars, le tarif d’accès à la principale scène est exorbitant.
Mais Tafadzwa Simba se réjouit d’avoir offert à la ville une parenthèse bienvenue d’activité qui a profité aux artistes comme aux chauffeurs de taxis et aux hôteliers.
« Vraiment, le HIFA est la preuve de ce qu’il est malgré tout possible d’entreprendre dans ce pays », souligne-t-il.
Conséquence de la crise, le produit intérieur brut du Zimbabwe a été diminué de moitié depuis le début des années 2000 et environ 90% de sa population active est officiellement au chômage.
Bouffée de liberté pour les jeunes de Harare, le festival constitue aussi une occasion inespérée pour les artistes étrangers de découvrir de l’intérieur la réalité du pays.
« J’ai trouvé une chambre chez l’habitant à Highfield, un des quartiers défavorisés de la ville, mais je m’y sens parfaitement en sécurité et surtout bienvenu », se félicite le ténor Jochen Kraus, 44 ans, venu chanter avec sa Chorale philharmonique de Munich.
« C’est une occasion à ne pas manquer de pouvoir participer à une grande aventure », poursuit-il.
A condition d’en accepter les aléas. Ce matin, Jochen Kraus est à la recherche d’un pianiste pour remplacer celui qui devait l’accompagner, qui s’est fait porter pâle à la dernière minute. « Ca fait partie du jeu », conclut-il, philosophe.
Fondé en 1999, le Festival international des arts de Harare (HIFA) n’a pas eu lieu l’an dernier, victime de l’effondrement économique du pays dirigé d’une main de fer depuis 1980 par le plus âgé des chefs d’Etat de la planète, 93 ans.
Ses habitués croyaient l’événement perdu pour toujours. Malgré le retrait de nombre de ses parrains, les organisateurs sont parvenus à le ressusciter pour une nouvelle édition, comme un gant jeté à la figure du président.
« L’argent est le problème numéro 1 de tous », estime Chidochemoyo Nemhara, un festivalier de 29 ans, « mais nous savons que le HIFA est l’endroit où nous pouvons oublier tout le reste ».
Plus d’une centaines d’artistes, musiciens, chanteurs ou acteurs, locaux ou venus de l’étranger, se sont produits cette année sur une dizaine de sites répartis dans toute la ville.
Tête d’affiche du programme, le musicien et chanteur malien Habib Koite clôturera les festivités dimanche soir.
Son directeur Tafadzwa Simba s’étonne encore du tour de force qui lui a permis d’organiser le festival malgré le retrait des entreprises, fondations et ambassades étrangères qui jugeaient sa tenue « impossible » en raison de l’état financier du pays.
« Techniquement, le pays est fauché », s’amuse M. Simba, « et pourtant nous sommes là ! »
– ‘Une vie ouverte et libre’ –
Là et volontiers provocateurs. Malgré le contrôle orwellien exercé par la police du régime, le festival affiche fièrement un mot d’ordre, « mettre en scène une intervention », très en phase avec la fronde anti-Mugabe qui a agité le pays l’an dernier.
« Tout le monde sait ce que ça veut dire », confirme Chiedza Mahere, un graphiste et blogueur de 27 ans.
« Nous sommes dirigés par un gouvernement qui veut tout prendre », poursuit-il, « mais il nous faut vivre notre vie malgré tout, une vie ouverte et libre où nous pouvons être ce que nous voulons, c’est tout le sens du HIFA ».
L’esprit est resté, donc, mais l’organisation a relevé cette année du cauchemar. Et particulièrement la mise en vente de tickets, dans un pays menacé de pénurie d’argent liquide.
Après l’hyperinflation dévastatrice du début des années 2000, le dollar américain est devenu la seule monnaie du pays. Mais, en raison de la crise, il s’est fait de plus en plus rare. Les autorités ont donc émis il y a six mois des « billets d’obligation » qui, même gagés sur le billet vert, rencontrent peu de succès.
Tout près des guichets du festival, les queues s’étirent devant les banques, grossies d’usagers bien résolus à empocher leur retrait quotidien maximal de 50 dollars.
« Le gouvernement nous demande d’utiliser ses billets d’obligations mais les magasins les refusent », rouspète Gamuchirai Gatawa, 20 ans, ticket d’entrée au festival en main, « alors je dois souvent faire la queue (à la banque) de 06H00 à 14H00 ».
– ‘Aventure’ –
Bien sûr, ces difficultés logistiques et le prix des billets ont pesé sur l’affluence, qui restera en-deça des 49.000 entrées d’il y a deux ans, admettent les organisateurs. Fixé à 20 dollars, le tarif d’accès à la principale scène est exorbitant.
Mais Tafadzwa Simba se réjouit d’avoir offert à la ville une parenthèse bienvenue d’activité qui a profité aux artistes comme aux chauffeurs de taxis et aux hôteliers.
« Vraiment, le HIFA est la preuve de ce qu’il est malgré tout possible d’entreprendre dans ce pays », souligne-t-il.
Conséquence de la crise, le produit intérieur brut du Zimbabwe a été diminué de moitié depuis le début des années 2000 et environ 90% de sa population active est officiellement au chômage.
Bouffée de liberté pour les jeunes de Harare, le festival constitue aussi une occasion inespérée pour les artistes étrangers de découvrir de l’intérieur la réalité du pays.
« J’ai trouvé une chambre chez l’habitant à Highfield, un des quartiers défavorisés de la ville, mais je m’y sens parfaitement en sécurité et surtout bienvenu », se félicite le ténor Jochen Kraus, 44 ans, venu chanter avec sa Chorale philharmonique de Munich.
« C’est une occasion à ne pas manquer de pouvoir participer à une grande aventure », poursuit-il.
A condition d’en accepter les aléas. Ce matin, Jochen Kraus est à la recherche d’un pianiste pour remplacer celui qui devait l’accompagner, qui s’est fait porter pâle à la dernière minute. « Ca fait partie du jeu », conclut-il, philosophe.