Praia (Cap-Vert), 16 avr 2017 (AFP)

Chaque deuxième semaine d’avril, le centre historique de Praia, petite capitale de l’archipel africain du Cap-Vert, accueille des musiciens de tous styles, rêvant de tubes et de gloire sur les traces de l’enfant du pays devenue star mondiale, Cesaria Evora.
Cette année encore, Atlantic Music Expo (AME) et le Kriol Jazz Festival, ont attiré – du 10 au 15 avril – des artistes venus d’aussi loin que le Brésil ou Haïti, désireux de montrer leur talent aux producteurs internationaux réunis au large du Sénégal dans cette ancienne colonie portugaise que sa richesse musicale a fait connaître.
Plus de 500 professionnels de la musique – artistes, producteurs, tourneurs, directeurs de festivals et de salles de spectacles… – ont convergé cette année vers le marché professionnel, les tables rondes, les conférences et les concerts proposés par l’AME.
« On espère rencontrer beaucoup de tourneurs, parce que les tourneurs c’est eux qui vont nous permettre de montrer notre musique un peu partout dans le monde », explique la chanteuse gabonaise installée à Bamako Pamela Badjogo, programmée à l’AME et qui s’est déjà produite à travers l’Afrique et à Paris.
« Au cours de cette 5e édition de l’AME, des producteurs étrangers ont montré beaucoup d’intérêt envers les artistes capverdiens comme Lucibela et Os Tubarões » ou envers la Sud-Africaine Tribute Birdie, s’est félicité José Da Silva, directeur exécutif de l’AME.
L’ombre de Cesaria Evora, décédée en décembre 2011, qui fit connaître au monde ce petit archipel de 500.000 habitants dont elle est la fille la plus célèbre, plane sur l’évènement: les producteurs cherchent une nouvelle « Diva aux pieds nus », des artistes se rêvent un destin semblable.
Selon M. Da Silva – qui fut le manager de Cesaria Evora, dont il relança la carrière et qu’il fit connaître hors des frontières du Cap-Vert – certains producteurs comparent ainsi déjà Lucibela à sa glorieuse aînée.
« Cesaria est unique et il n’y aura jamais une autre Cesaria », tempère humblement la jeune chanteuse cap-verdienne.
« Ce que je veux c´est continuer le travail que Cesaria a commencé. Je veux chanter les genres musicaux cap-verdiens comme la morna et coladeira un peu partout dans le monde », explique-t-elle, « mais je veux y arriver avec mon propre talent ».
Rythmes traditionels, Afrojazz, soul, R&B, rap, musique électronique, joués par des artistes venus d’Afrique, d’Amérique et d’Europe: de très nombreux styles sont représentés et les racines africaines mises en avant à l’AME.
Sur scène, la tradition cap-verdienne a cotoyé les sonorités électro-créoles des Réunionnais de Domoon, la fusion de rumba gitane, flamenco, gnawa et chaabi des Algéro-Canadiens de Labess, le jazz américain du Ron Savage Trio ou le fado du Portugais Duarte.
Le salon se veut « une plateforme d’échange culturel transatlantique » sur cet archipel au carrefour des trois continents, qui fut longtemps une tête de pont de la traite des esclaves et du commerce triangulaire et dont la musique est un métissage d’influences portugaises et africaines.
L’AME terminé, Praia est restée bercée de musique avec le Kriol Jazz Festival qui a pris immédiatement pris le relais.
Sa programmation mêle jeunes artistes des trois continents et pointures internationales du jazz, comme cette année le pianiste cubain Roberto Fonseca ou le guitariste français Sylvain Luc, ravi de la chaleur joyeuse du public cap-verdien.
« Normalement, je joue dans des salles fermées, puisque les concerts de jazz sont intimes, mais je constate qu’ici le public du Kriol Jazz aime réagir avec vivacité, c´est un public qui a de la joie et ça c´est bon », s’est réjoui le guitariste français, très applaudi.