Lusaka, 12 avr 2017 (AFP)

Le principal opposant zambien Hakainde Hichilema a été inculpé mercredi de trahison pour avoir tenté de bloquer le convoi présidentiel, une claire mise en garde du régime d’Edgar Lungu à ceux qui s’obstinent à refuser de reconnaître sa réélection.
Arrêté mardi, M. Hichilema est poursuivi pour “trahison” avec cinq autres militants de son parti, a annoncé à la presse le patron de la police zambienne, Kakoma Kanganja.
Surnommé “HH”, le chef du Parti uni pour le développement national (UPND) a également été inculpé de refus d’obtempérer à un ordre de la police et d’insultes.
“Il est établi que le chef de l’opposition a désobéi à la police qui lui ordonnait de laisser passer le convoi présidentiel et a tenté de mettre en danger la vie du président de la République”, a justifié l’inspecteur général Kanganja.
Selon le quotidien d’Etat Daily Mail, un convoi de véhicules, dont celui de M. Hichilema, a tenté dimanche d’intercepter la caravane présidentielle en déplacement dans l’ouest du pays.
La qualification de trahison, qui exclut la libération sous caution en Zambie, est passible d’un minimum de quinze ans de prison et dans le pire des cas de la peine de mort.
Le chef de l’opposition a été arrêté mardi matin à son domicile de Lusaka au terme de plusieurs heures d’un siège qui a mobilisé une centaine de policiers.
Les forces de l’ordre ont pris d’assaut sa maison en faisant usage de gaz lacrymogène, avant de le conduire dans un camp d’entraînement de la police pour qu’il y soit interrogé.
Cette arrestation et, surtout, les charges retenues contre M. Hichilema ont été dénoncées par l’opposition et la société civile, qui y voient la volonté du régime de lui faire payer son refus de reconnaître la victoire de M. Lungu à l’élection présidentielle d’août 2016.
– ‘Tensions’ –
“Hichilema est accusé de ne pas avoir laissé passer le convoi car il ne reconnaît pas la légitimité du président”, a commenté à l’AFP un analyste politique indépendant, Neo Simutanyi.
Candidat pour la cinquième fois à la magistrature suprême lors de la dernière présidentielle, Hakainde Hichilema n’a été devancé que de 100.000 voix (2,5% des suffrages) par le sortant, au pouvoir depuis 2015.
Il a contesté les résultats, arguant de fraudes, mais la Cour constitutionnelle a finalement validé la réélection de M. Lungu. Il a depuis déposé d’autres recours devant les tribunaux.
“Arrêter des chefs de l’opposition pour des accusations aussi lourdes est le meilleur moyen de raviver les tensions dans un climat économique et politique déjà volatil”, a déploré la cheffe du Conseil de coordination des ONG, Sara Longwe.
Ce n’est pas la première fois qu’Hakainde Hichilema est interpellé. En octobre dernier, il avait passé une nuit en détention, accusé d’incitation à l’insurrection et de rassemblement interdit.
Devant la presse, le chef de la police a adressé mercredi un message à peine voilé aux partisans de M. Hichilema.
“Les actes du chef de l’opposition sont déraisonnables, dangereux et criminels”, a martelé l’inspecteur général Kanganja. “Le public est prévenu que la police réagira à tout comportement similaire, quel que soit le statut ou l’affiliation politique de ses auteurs”.
“Avec cette accusation de trahison, HH pourrait être détenu un moment”, a pronostiqué l’analyste Neo Simutyuani, “cela va arranger le parti au pouvoir qui veut mettre en sourdine le débat sur les résultats des élections”.
Deuxième producteur de cuivre du continent africain, la Zambie a enregistré l’an dernier une croissance économique de 3%, la plus faible depuis 1988.