Dakar, 30 juil 2017 (AFP)

Le Sénégal élisait dimanche sa nouvelle Assemblée nationale lors d’un scrutin test, à 18 mois de la présidentielle dans un climat tendu, l’ancien président Abdoulaye Wade imputant les problèmes d’organisation à la volonté de son successeur Macky Sall de contrarier une victoire de l’opposition.
Un enjeu de cette dernière consultation avant l’élection présidentielle de 2019 sera de mesurer les forces du camp de Macky Sall, élu en 2012 face à Abdoulaye Wade (2000-2012), et qui espère consolider sa majorité.
L’opposition affirme vouloir lui imposer “une cohabitation”, mais ses chances d’y parvenir ont diminué après son échec à s’entendre sur une liste commune. L’un des autres principaux opposants, le maire de Dakar, Khalifa Sall, en détention préventive pour détournement de fonds présumé depuis mars, a dû faire campagne de sa cellule.
Les premiers résultats de ce scrutin à un tour sont en principe attendus dans la nuit de dimanche à lundi.
Les bureaux devaient être ouverts de 08H00 à 18H00 GMT, mais à Touba (centre), où les retards, dus notamment aux violents orages qui ont touché dans la nuit le pays, ont été particulièrement longs, le gouverneur a repoussé à minuit la fermeture des bureaux.
“Macky Sall s’est arrangé, il a donné des instructions pour que, dans tous les endroits où il pense que l’opposition va gagner, il n’y ait pas de vote. C’est ce qu’il est en train d’organiser”, a déclaré M. Wade, après avoir voté en milieu d’après-midi à Dakar.
“Une élection dans laquelle un des candidats ne trouve pas ses bulletins de vote dans les bureaux de vote, on ne peut pas appeler ça une élection”, a-t-il dit, en référence aux retards de plusieurs heures du scrutin dans certaines régions, en raison de l’absence des bulletins de plusieurs listes.
“Je demande à tous les électeurs qui ont voté de rester à leur bureau de vote jusqu’à la proclamation des résultats pour constater que ces résultats sont conformes à la réalité”, a ajouté le chef du Parti démocratique sénégalais (PDS), 91 ans, rentré au pays le 10 juillet pour faire campagne, après plus de deux ans d’absence.
A Touba, un centre de vote a été “saccagé” par des électeurs qui s’insurgeaient contre l’absence de bulletins de la coalition de M. Wade, a rapporté l’agence de presse officielle APS.
– Pas de ‘retour en arrière’ –
Pendant la campagne électorale, M. Wade avait accusé les autorités de tenter d’éviter une victoire de l’opposition en délivrant de manière sélective les cartes d’identité biométriques nécessaires au vote, dont plusieurs centaines de milliers n’ont pu être fournies à temps.
De son côté, Macky Sall a souhaité que les difficultés dues aux “retards dans des centres” puissent être surmontées, dans des déclarations rapportées par les médias locaux, dont l’APS.
“Je souhaite que les populations votent dans le calme et retournent chez elles dans le calme”, a-t-il ajouté, affirmant que “le Sénégal est une démocratie que rien ne peut faire revenir en arrière”.
Une des complications de ce scrutin réside dans le nombre inédit de listes – 47, contre 24 en 2012 – exigeant la présence de 47 bulletins dans chaque bureau de vote.
Les contretemps se sont accumulés pour de nombreux électeurs. Il a notamment fallu nettoyer les centres de vote après les intempéries de la nuit.
Mais ce sont les problèmes liés aux listes d’électeurs et à la distribution des cartes d’identité biométriques qui gênaient le plus les opérations, malgré l’autorisation accordée in extremis par le Conseil constitutionnel, de voter avec le récépissé de dépôt de demande de carte, accompagné d’une pièce d’identité.
“Je rentre chez moi. J’ai fait plusieurs bureaux de vote. Mon nom n’est nulle part”, a expliqué, dépité, Souleye Tine, après avoir consulté plusieurs listes d’électeurs dans un centre de vote de la Médina, un quartier populaire de Dakar.
Plus de 6,2 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes dans près de 14.000 bureaux répartis dans le pays et dans huit “départements de l’étranger” pour la diaspora, qui sera représentée pour la première fois par 15 députés sur 165.
Sur les 165 sièges de l’Assemblée, élue pour cinq ans, 105, dont les 15 de la diaspora, seront pourvus au scrutin majoritaire, un système très favorable au parti qui terminera premier dans chaque département, puisqu’il en raflera tous les sièges. Soixante autres sièges seront répartis à la proportionnelle.