Paris (AFP)
Ils disent avoir été « spoliés » par rapport à leurs collègues français et demandent « réparation » à la SNCF pour discrimination: 800 cheminots d’origine marocaine, dont le cas est examiné en appel jusqu’à mardi, devront encore patienter jusqu’à début 2018 pour être fixés.
Après moult renvois et, pour certains, 12 ans de procédure, plus de 200 « Chibanis » (cheveux blancs en arabe) le matin, et autant l’après-midi, ont assisté lundi à la première journée de débats devant la Cour d’appel de Paris, dans une salle comble. Des enfants ou épouses représentaient parfois leur proche, mort ou malade.
Deux anciens salariés ont été autorisés à s’exprimer au nom des autres. « On travaillait comme des moutons », a raconté le premier à la cour, disant avoir « baissé la tête » parce qu’il avait « une famille sur le dos ».
« On est là pour défendre notre honneur » car « la SNCF a profité de nous », a dit le second, ému aux larmes en évoquant le moment où il a découvert le montant de sa retraite.
En première instance, la SNCF avait été condamnée pour discrimination dans la quasi-totalité des dossiers. Le montant des dommages et intérêts prononcés en septembre 2015 devant le conseil de prud’hommes de Paris, suspendus par l’appel formé in extremis par le groupe public, s’élevait alors à 170 millions d’euros.
Embauchés comme contractuels, donc avec un CDI de droit privé, les Chibanis n’ont pour la plupart pas bénéficié du « statut » plus avantageux des cheminots, réservé aux ressortissants européens, sous condition d’âge.
La SNCF a recruté au total près de 2.000 Marocains entre 1970 et 1983, en vertu d’une convention signée entre la France et le Maroc qui garantissait « l’égalité des droits et de traitement avec les nationaux », a souligné l’avocat du défenseur des Droits.
-« discrimination organisée »-
La discrimination ne fait selon lui aucun doute : elle « ne prospère pas dans l’opacité, elle est organisée, statutaire », « en gros assumée », a déclaré Slim Ben Achour, en livrant une charge contre la clause de nationalité, supprimée dès 2002 par la RATP, a-t-il rappelé.
Pour l’avocat général, il ne s’agit « pas de juger de la légalité du statut » mais de regarder si sa mise en oeuvre a pu « causer une discrimination ».
Et l’avis de ce dernier pourrait faire pencher la balance du côté des salariés: « d’une manière générale, la discrimination pourra être retenue », a-t-il dit en demandant à la cour de prendre chaque décision « au regard des dossiers individuels » et « éléments probants fournis ».
Auparavant, les avocats des deux parties s’étaient affrontés sur la pertinence des « panels » de comparaison fournis par l’entreprise et le sens des différents statuts et catégories de salariés au sein de la SNCF.
« On n’évolue pas en claquant des doigts », « on évolue en fonction des compétences » et « en passant par la case examen », a lancé l’une des avocates de la SNCF, en soutenant que les règles étaient « identiques » pour tous les salariés.
« Lorsqu’ils sont arrivés, ils n’avaient pas les cheveux gris, ils étaient jeunes », « c’est 40 ans de discrimination qui sont posés devant vous », « ils ont été cantonnés » aux plus basses catégories, a lancé Me Clélie de Lesquen-Jonas, l’avocate des salariés.
Elle a demandé la reconnaissance d’un « préjudice moral » et un montant de dommages et intérêts « dissuasif », au regard des 70 millions d’euros d’économie par an réalisés par la SNCF, selon un chiffre communiqué aux syndicats et versé au dossier.
A plusieurs reprises, l’avocate a dénoncé le « cynisme » de la SNCF.
Pour l’avocat du Défenseur des Droits, ce dossier n’est « pas totalement étranger à notre histoire coloniale ». « C’est une affaire qui résonne, car la SNCF a mis en place une sorte de préférence nationale » qui « doit cesser », estime-t-il.
Au vu du nombre de dossiers et des « moyens » de la cour, les jugements seront rendus le 31 janvier 2018, le temps de réaliser le « travail colossal », « de dentelle » requis par ce dossier, a expliqué à l’auditoire la présidente, saluant à plusieurs reprises leur « retenue ».
Après moult renvois et, pour certains, 12 ans de procédure, plus de 200 « Chibanis » (cheveux blancs en arabe) le matin, et autant l’après-midi, ont assisté lundi à la première journée de débats devant la Cour d’appel de Paris, dans une salle comble. Des enfants ou épouses représentaient parfois leur proche, mort ou malade.
Deux anciens salariés ont été autorisés à s’exprimer au nom des autres. « On travaillait comme des moutons », a raconté le premier à la cour, disant avoir « baissé la tête » parce qu’il avait « une famille sur le dos ».
« On est là pour défendre notre honneur » car « la SNCF a profité de nous », a dit le second, ému aux larmes en évoquant le moment où il a découvert le montant de sa retraite.
En première instance, la SNCF avait été condamnée pour discrimination dans la quasi-totalité des dossiers. Le montant des dommages et intérêts prononcés en septembre 2015 devant le conseil de prud’hommes de Paris, suspendus par l’appel formé in extremis par le groupe public, s’élevait alors à 170 millions d’euros.
Embauchés comme contractuels, donc avec un CDI de droit privé, les Chibanis n’ont pour la plupart pas bénéficié du « statut » plus avantageux des cheminots, réservé aux ressortissants européens, sous condition d’âge.
La SNCF a recruté au total près de 2.000 Marocains entre 1970 et 1983, en vertu d’une convention signée entre la France et le Maroc qui garantissait « l’égalité des droits et de traitement avec les nationaux », a souligné l’avocat du défenseur des Droits.
-« discrimination organisée »-
La discrimination ne fait selon lui aucun doute : elle « ne prospère pas dans l’opacité, elle est organisée, statutaire », « en gros assumée », a déclaré Slim Ben Achour, en livrant une charge contre la clause de nationalité, supprimée dès 2002 par la RATP, a-t-il rappelé.
Pour l’avocat général, il ne s’agit « pas de juger de la légalité du statut » mais de regarder si sa mise en oeuvre a pu « causer une discrimination ».
Et l’avis de ce dernier pourrait faire pencher la balance du côté des salariés: « d’une manière générale, la discrimination pourra être retenue », a-t-il dit en demandant à la cour de prendre chaque décision « au regard des dossiers individuels » et « éléments probants fournis ».
Auparavant, les avocats des deux parties s’étaient affrontés sur la pertinence des « panels » de comparaison fournis par l’entreprise et le sens des différents statuts et catégories de salariés au sein de la SNCF.
« On n’évolue pas en claquant des doigts », « on évolue en fonction des compétences » et « en passant par la case examen », a lancé l’une des avocates de la SNCF, en soutenant que les règles étaient « identiques » pour tous les salariés.
« Lorsqu’ils sont arrivés, ils n’avaient pas les cheveux gris, ils étaient jeunes », « c’est 40 ans de discrimination qui sont posés devant vous », « ils ont été cantonnés » aux plus basses catégories, a lancé Me Clélie de Lesquen-Jonas, l’avocate des salariés.
Elle a demandé la reconnaissance d’un « préjudice moral » et un montant de dommages et intérêts « dissuasif », au regard des 70 millions d’euros d’économie par an réalisés par la SNCF, selon un chiffre communiqué aux syndicats et versé au dossier.
A plusieurs reprises, l’avocate a dénoncé le « cynisme » de la SNCF.
Pour l’avocat du Défenseur des Droits, ce dossier n’est « pas totalement étranger à notre histoire coloniale ». « C’est une affaire qui résonne, car la SNCF a mis en place une sorte de préférence nationale » qui « doit cesser », estime-t-il.
Au vu du nombre de dossiers et des « moyens » de la cour, les jugements seront rendus le 31 janvier 2018, le temps de réaliser le « travail colossal », « de dentelle » requis par ce dossier, a expliqué à l’auditoire la présidente, saluant à plusieurs reprises leur « retenue ».