Djerba (Tunisie), 12 mai 2017 (AFP)

Le pèlerinage juif de la Ghriba s’est ouvert dans une ambiance festive vendredi sur l’île tunisienne de Djerba, ses organisateurs se félicitant d’un regain d’affluence après plusieurs années difficiles du fait des menaces sécuritaires dans le pays.
Sous un important dispositif policier, des groupes de dizaines de pèlerins, de tous âges, ont commencé à affluer en milieu de matinée vers la synagogue de la Ghriba, la plus ancienne d’Afrique, a constaté un journaliste de l’AFP.
Venus de Tunisie mais aussi d’Europe, ils ont prié, allumé des bougies et inscrit des voeux sur des oeufs, avant de les déposer dans une cavité au fond de la synagogue. D’autres ont célébré l’événement autour d’une bouteille de boukha, un alcool de figue local.
« Mes parents m’ont amené à Djerba tout petit et tous les ans je suis ici. Cette fois, je suis venu avec mon grand-frère et des amis. (…) On est heureux d’être là », a dit à l’AFP Sylvain, 55 ans, décorateur à Paris.
« Demain on fait shabbat et on reviendra dimanche pour refaire une très bonne seconde journée », a-t-il ajouté.
Sa fille de deux mois et demi dans les bras, Sabrina, accompagnée de son mari, a elle aussi jugé « très important » d’avoir fait le déplacement depuis la France, malgré ses « appréhensions » sur la sécurité.
« La naissance de la petite, c’est un miracle de Dieu. On entend aussi beaucoup d’autres miracles ici, et on est venu prier pour l’ensemble du peuple juif », a-t-elle poursuivi.
Au milieu des youyous et des chants, plusieurs centaines de pèlerins ont participé aux festivités de l’après-midi, sous une chaleur lourde.
– ‘Comme chez moi’ –
Encadrés par des policiers, militaires et membres de la Brigade antiterroriste (BAT), ils ont notamment effectué une courte procession avec la « Menara », un objet de culte décoré de foulards.
Le pèlerinage de la Ghriba, organisé chaque année au 33e jour de la Pâque juive, est au coeur des traditions des Tunisiens de confession juive. Cette communauté ne compte toutefois plus que quelque 1.500 âmes, contre 100.000 avant l’indépendance en 1956.
De nombreux pèlerins sont ainsi venus de France, mais aussi de Belgique, d’Espagne, des Etats-Unis et même d’Israël, malgré l’appel de l’Etat hébreu à ne pas se rendre à Djerba.
« Chaque année, ils disent la même chose. Personnellement, je me sens comme chez moi, et je trouve l’accueil excellent, les gens chaleureux », a déclaré à l’AFP Aziz Baroum, 55 ans, dont les parents sont natifs de Tunisie mais qui vit à Ashkelon, dans le sud d’Israël.
Déjà présent l’an dernier, il a assuré, comme d’autres pèlerins, que le nombre de participants était sensiblement plus important cette année.
Les organisateurs se sont également félicités d’un regain d’affluence, sans doute favorisé par l’embellie -même précaire- de la sécurité en Tunisie.
« Ca se passe très bien, on progresse », a fait valoir à l’AFP René Trabelsi, co-organisateur et dont le père, Perez, est président de la synagogue de la Ghriba.
Cette accalmie sécuritaire fait suite à une série d’attaques jihadistes sanglantes ayant frappé la Tunisie en 2015 et début 2016 (plusieurs dizaines de morts dont 59 touristes étrangers).
« On n’a jamais coupé le cordon, on a tenu bon (…) Il y a un réel attachement », a argué M. Trabelsi, d’après qui le nombre de visiteurs pourrait atteindre 3.000 d’ici dimanche soir, dont « 1.800 » de l’étranger.
Ce chiffre reste toutefois éloigné des 8.000 personnes qui se rendaient au pèlerinage de la Ghriba avant un attentat suicide au camion piégé contre la synagogue en 2002, qui avait fait 21 morts.