Tunis, 20 avr 2017 (AFP)

Un Conseil de la presse a officiellement été lancé jeudi en Tunisie pour lutter contre « les dérives » dans le secteur médiatique, en pleine refonte depuis la révolution de 2011, et pour instaurer « un journalisme de qualité ».
« C’est un jour historique, pas seulement pour les journalistes (…) mais aussi pour la démocratie tunisienne et la liberté d’expression en général », s’est félicité Néji Bghouri, le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), lors d’une conférence de presse.
Ce Conseil d’autorégulation, en gestation depuis plusieurs années, sera notamment chargé de rédiger une charte de déontologie. Créé par plusieurs organisations comme le SNJT et l’Association des directeurs de journaux, il est pour l’instant dirigé par un comité provisoire devant mettre en place des règles pérennes.
Le lancement de l’instance « survient dans un contexte sans précédent qui connaît de plus en plus de manquements à l’éthique journalistique dans plusieurs médias audiovisuels, écrits et électroniques en Tunisie », a relevé dans un communiqué l’ONG Article 19, qui a accompagné sa création.
« Nous recevons de nombreuses plaintes de la part du public concernant des violations commises par les médias et la presse, notamment pour régionalisme (…) ou racisme », a confirmé M. Bghouri.
Beaucoup de Tunisiens jugent que certains médias sont devenus des outils « pour régler des comptes, calomnier, propager de fausses informations et parfois pour diffuser des discours de violence et de haine », a-t-il averti.
M. Bghouri en veut pour preuve la récente fuite d’un enregistrement attribué au fondateur d’une télévision privée, dans lequel il planifie une campagne de dénigrement contre une ONG anti-corruption. L’audio a fait scandale et le Parquet a ouvert une enquête judiciaire.
Dans un premier temps, le Conseil de la presse veut faire de l' »accompagnement et de la pédagogie ».
Mais il pourra ensuite y avoir « des avertissements, des blâmes. On va aller crescendo jusqu’à, s’il le faut, retirer la carte (de presse) professionnelle » aux journalistes ayant violé les principes déontologiques, a dit à l’AFP l’un de ses membres, Manoubi Marrouki.
Le Conseil, qui sera financé par le biais d’une association, espère aussi peser sur l’attribution des publicités publiques à la presse écrite en établissant « une liste des médias qui respectent la déontologie », selon M. Bghouri.
Les médias tunisiens étaient totalement muselés sous la dictature de Zine El Abidine Ben Ali, balayée par un soulèvement populaire dont le principal acquis est, de l’avis général, une liberté d’expression sans précédent dans le pays.